« Le football inclusif au Sénégal : Les malentendants marquent des buts »
Le succès de l'équipe nationale des sourds d'Afrique : Championne en 2021, médaille de bronze au Mondial en Malaisie
octobre 27, 2023
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Dans le petit groupe de joueurs à l’échauffement, la joie de vivre d’Issa Tall ne passe pas inaperçue. Entre les rires et les tapes amicales sur le dos de ses partenaires, il faut l’entendre s’exprimer par des sons indistincts pour reconnaître « Issa Moumeu » (Issa le sourd), comme on l’appelle affectueusement dans le quartier populaire de Fass, à Dakar.
Changer la perception du grand âge en Afrique du Sud grâce au ‘mamie foot’
Le défenseur central s’intègre parfaitement parmi ses coéquipiers, car il a grandi avec eux depuis son enfance. Sowrou Dieng, son entraîneur à l’ASC Fass Delorme, explique : « Nos écoles de football accueillaient des enfants de tous types de handicaps. J’ai vu d’autres malentendants dans mon école, et il n’y avait aucune distinction de traitement entre les enfants handicapés et leurs camarades sans handicap. »
Issa Tall, capitaine de l’équipe nationale des sourds au Sénégal, mène une double vie sportive. Il s’entraîne aux côtés de joueurs entendants dans le championnat sénégalais de football, mais il est également le fer de lance de l’équipe nationale des sourds. Récemment, cette équipe a participé avec succès au Mondial des sélections de sourds en Malaisie, au début d’octobre. Le Sénégal est l’un des 56 pays dans le monde qui ont des équipes nationales de football pour les sourds, et parmi les six États africains qui ont participé à la Coupe du Monde organisée par la Deaf International Football Association. Lors du dernier tournoi, les Lions de la Teranga ont remporté des victoires remarquables contre des équipes telles que l’Argentine et les États-Unis, et ils ont décroché la médaille de bronze en dépit de conditions qui, selon leur entraîneur Souleymane Bara Fomba, n’étaient pas idéales.
Former les arbitres
Le point qu’il soulève, c’est que les autorités n’investissent que peu de ressources pour soutenir l’équipe nationale des sourds, malgré ses performances impressionnantes. En 2021, l’équipe s’est fait remarquer en remportant le championnat d’Afrique des sourds, les « Deaflympics », lors de sa première édition au Kenya. Quelques années plus tard, alors que le Sénégal se vante de sa série de succès continentaux dans le football des bien-entendants, certains experts rappellent que cette dynamique victorieuse a commencé bien avant avec l’équipe d’Issa Tall.
Cela met en évidence l’importance de soutenir et de reconnaître les équipes sportives des sourds, qui ont également démontré leur compétence et leur détermination dans le sport, malgré les ressources limitées qui leur sont généralement allouées.
« La Côte d’Ivoire est confrontée à un défi majeur en préparant sa participation à la Coupe d’Afrique des Nations. »
« Mamadou Lamine Diallo, le secrétaire général de l’Association des sports des sourds du Sénégal, déclare que le sport pour les sourds au Sénégal a connu des progrès au fil des années. Cependant, de nombreux défis subsistent, notamment garantir la régularité des compétitions entre les athlètes sourds et développer davantage de clubs locaux afin de permettre aux joueurs des régions en dehors de la capitale de se distinguer. En vue de repérer de jeunes talents et de se préparer à la prochaine Coupe du monde, dix équipes issues de différentes régions du pays ont participé à un tournoi en septembre. Souleymane Bara Fomba se montre optimiste en soulignant que le Sénégal dispose d’une relève prometteuse et d’un vaste vivier de joueurs. »
Abdou Aziz Dieng, lui, voit plus loin. Interprète en langue des signes et ancien entraîneur du Sénégal lors du championnat d’Afrique de 2021, il rêve d’une intégration des sourds dans le football professionnel aux côtés des bien-entendants. Première étape : former les arbitres à allier les signaux visuels aux alertes sonores. Un exemple ? « L’arbitre central tient un sifflet et un drapeau. A chaque fois qu’il doit siffler un but ou un coup franc, il lève le drapeau en même temps, comme ça les joueurs sourds s’arrêtent. » Optimiste malgré « l’absence d’avancées », Abdou Aziz Dieng assure qu’une telle réforme permettrait aux sourds de « s’exprimer sur le terrain, extérioriser leurs talents mais aussi abolir les différences